Exposition : Les Demoiselles Revisited

Quand

03/05/2025 - 14/06/2025    
11 h 30 min - 19 h 30 min

Galerie S/Beaubourg
35 rue Quincampoix, Paris, 75004

Type d’évènement

L’exposition Les Demoiselles Revisited, organisée par Art Engagement Consulting à la nouvelle galerie S/Beaubourg — reprise à la mi-mars 2025 par Micaela Neveu et Patrik Gunnteg — a suscité, le 6 mai dernier, un vif intérêt auprès du public parisien.

Le parcours, imaginé par Art Mouvance, spécialiste de la scénographie d’exposition et des récits muséologiques, propose un accrochage performatif et minimaliste. Les œuvres, simplement disposées à hauteur d’homme, participent pleinement de l’expérience de la visite, invitant le spectateur à vivre une « expérience organique » face à la toile. « Cherche à être l’œuvre », peut-on lire sur certains cartels. Mais pourquoi ? Les personnages féminins de Bedri Baykam — tantôt muses, tantôt compagnes d’un harem imaginaire ou de celui de Picasso — évoquent les femmes exotiques de la rue d’Avinyó, qui inspirèrent en 1907 Les Demoiselles d’Avignon, monument fondateur de la peinture moderne. Elles croisent ici la sensualité de silhouettes noires anonymes — debout devant un fauteuil, en posture de scène, ou allongées, lascives, sur un canapé, comme en attente, face à une fenêtre ouverte sur la capitale. À ces présences énigmatiques répondent les regards introspectifs des modèles nus de Baykam, capturés dans ses lenticulaires « 4D » — sortes de grandes baies, où la dimension temporelle s’incorpore à l’œuvre. Les formes, sculptures et corps s’y démultiplient en un jeu de transparences, en dialogue avec un Istanbul à la croisée des cultures occidentale et orientale. Quel est leur point commun? La puissance féminine, la sexualité exposée — cette force qui, depuis toujours, a submergé le regard masculin : celui des peintres, celui des hommes. L’archétype de la prostituée a longtemps emprisonné dans la réalité l’inspiration artistique dans les cadres de l’histoire de l’art occidental. Peut-on dès lors rendre leur liberté aux Demoiselles, qu’elles soient celles du passé, celles de Madame Claude, ou celles de la maison close de Varol à Istanbul, où les jeunes hommes vivaient leur première expérience sexuelle? Refoulerons-nous encore longtemps, loin de nous, cette figure à la fois fragile et puissante, reléguée aux ruelles sombres, aux histoires cachées, aux mensonges, aux scandales, aux cabarets sordides, aux lieux inavoués d’une urbanité brûlante et marginale — les « coins chauds » de la ville ? Cachée, maquillée, inavouée, rejetée ? L’exposition incite à cette réflexion par un jeu de miroirs entre les œuvres, face à nous. Elle invite le spectateur à entrer dans l’image, à s’y perdre, et à se demander: et si c’était moi ?

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