Naoko Sekine est une artiste qui utilise les matériaux et les outils les plus élémentaires – papiers, crayons et gommes – pour explorer toutes les possibilités du dessin à travers une œuvre dont la simplicité n’est qu’apparente.
Après avoir longtemps exploré le domaine de la peinture, elle commence dans les années 2000 à réaliser des œuvres composées d’une multitude de traits qui viennent recouvrir complètement le papier, à laquelle elle ajoute parfois un élément figuratif minimaliste.
Dans ses premières œuvres, par exemple, figuraient des parties de bâtiments et de pièces, ou des formes semblables à des montagnes. Grâce à un jeu de nuances subtiles d’ombres, de lumières et de mouvements, ces vues abstraites, monochromes, évoquent des formes dont la création semble avoir été interrompue avant de devenir trop suggestives, comme une sorte de “paysage de brume” qui rappelle vaguement les lavis japonais.
Au fil des années, le travail de Naoko Sekine évolue, en gardant une certaine constance : la couleur vient parfois s’ajouter subtilement aux nuances de gris et de nouveaux outils sont utilisés. Or, par-delà leur évolution visuelle et leur complexité, la performance chorégraphique y est toujours visible dans le rythme de ses traits. On retrouve un sens constant de l’intervalle, des hachures juxtaposées jusqu’aux lignes pointillées, depuis les virgules vers les zigzags lâchés dans une vitesse et une nervosité du poignet infiniment plus vives.
Ce qui est vrai à l’échelle des traits, l’est tout autant à celle du dessin ou du tableau. Continuité et contiguïté y vont de pair. “Il existe un concept japonais pour qualifier un vide qui n’est pas une séparation, mais un lien dans lequel le temps et l’espace fusionnent eux aussi : le Ma (間)”. Ainsi, en explorant l’instabilité des choses et de l’esprit, les dessins de Naoko Sekine mettent en évidence les notions d’intervalle, de rythme et de pulsation. Le monde vibrant qui apparaît ne pénètre pas profondément dans le champ de vision. D’un instant à l’autre, notre regard saisit différentes combinaisons, de nouvelles associations et le dessin évolue sous le regard du spectateur.
Aujourd’hui, les œuvres de Naoko Sekine attirent l’attention d’un nombre croissant de collectionneurs comme celle des plus grands musées du Japon. Portée par une ambition philosophique exigeante, son œuvre porte notre attention au-delà des objets qu’elle crée. Ceux-ci appartiennent à des énergies plus vastes ; ils ne font pas irruption dans notre monde, ils sont produits et effacés par des cycles déterminants et à peine perceptibles. Les dessins de Naoko Sekine remettent en question notre façon d’admirer un paysage et, bien que ses œuvres soient abstraites, elles ne sont pas pour autant une pure abstraction.